Éclairer la lanterne de quelqu’un
« Éclairer la lanterne de quelqu’un » signifie lui fournir le détail qui lui manquait pour comprendre la conversation en cours. L’analogie entre la lumière et la compréhension intellectuelle est simple – quand on est dans le noir et que quelqu’un allume la lumière, on y voit tout de suite beaucoup mieux – et fréquente : on dit de quelqu’un qui ne brille pas par ses capacités intellectuelles qu’il « n’est pas une lumière ».
Et pourtant, la lanterne à laquelle fait allusion l’expression n’est pas, comme on pourrait le croire, ce dispositif d’éclairage, courant dans les hôtels particuliers du XVIIIe siècle, composé d’une enveloppe de verre, à l’intérieur de laquelle on place une source lumineuse. Cette locution fait, en effet, référence à une fable de Jean-Pierre Claris de Florian, un fabuliste français du siècle des Lumières. Comme l’indique le titre de cette historiette, Le Singe qui montre la lanterne magique, il est ici question de l’ancêtre du cinéma. Née au XVIIe siècle et très à la mode au siècle suivant, la lanterne magique est un appareil de projection muni d’un système optique, qui permet de projeter des images peintes sur verre sur un écran en les agrandissant. Voulant épater ses camarades, le singe les convie à un spectacle de lanterne magique. Il se laisse toutefois griser par ses propres mots et en oublie le « détail » qui permettrait aux animaux de comprendre pourquoi ils sont rassemblés, allumer la lanterne : « Pendant tous ces discours, le Cicéron moderne / Parlait éloquemment et ne se lassait point. / Il n’avait oublié qu’un point / C’était d’éclairer sa lanterne1 . »
Suite à la parution de cette fable, « oublier d’éclairer la lanterne » voulait dire « omettre un point essentiel pour se faire comprendre ». L’expression se transforme ensuite pour celle qu’on connaît aujourd'hui.
1 Le Singe qui montre la lanterne magique