L’Art nouveau et l’Art déco à Bordeaux
Les premières décennies du XXe siècle constituent, pour Bordeaux comme pour le reste de la France, une période d’intense créativité. Si la ville n’est pas aussi importante que Nancy pour l’Art nouveau, elle participe toutefois au renouveau des arts décoratifs grâce à des personnalités comme le journaliste et critique Paul Berthelot.
Rédacteur à la Petite Gironde, il co-fonde en 1899 la Société d’Art Moderne de Bordeaux placée sous le patronage de l’UCAD (Union central des arts décoratifs de Paris). La société organise trois expositions à Bordeaux, en 1900 et 1901, et participe à l’Exposition universelle en 1900 à Paris. Grâce à Berthelot, les grands noms de l’Art nouveau, comme René Lalique, Auguste Delaherche, Victor Prouvé ou Alfons Mucha sont exposés à Bordeaux, participant ainsi à la diffusion, la vulgarisation et l’éducation artistique du public bordelais. Les objets légués à son décès à la ville de Bordeaux témoignent de sa vision moderne des arts décoratifs, signés par des artistes parisiens comme Alexandre Bigot, bordelais comme Henri Hamm, nancéen comme Emile Gallé, ou des manufactures étrangères comme Amphora.
Les années 1920 voient l’épanouissement de l’architecture Art déco à Bordeaux sous l’impulsion de son maire Adrien Marquet et de l’architecte de la ville Jacques d’Welles comme en témoignent la Bourse du travail (1938), la piscine Judaïque (1931-1935) ou encore le parc Lescure (1938), actuel stade Jacques Chaban-Delmas. Les Bordelais qui souhaitent renouveler leur intérieur et abandonner leur mobilier XVIIIe siècle, ont recours aux services de l’ensemblier Maurice Triboy, dont le musée conserve un ensemble caractéristique, ou de la décoratrice Madame Xavier Rozier, installée rue Fondaudège.
C’est à cette période que l’industriel Henry Frugès restaure entièrement son hôtel particulier, situé place des Martyrs de la Résistance à Bordeaux. Entre 1913 et 1927, il fait intervenir les plus grands artistes et artisans de l’époque : le ferronnier Edgar Brandt, Gentil & Bourdet pour les décors en mosaïque, le laqueur Jean Dunand, les verriers René Lalique et François Décorchemont et le décorateur Clément Mère. Conservé en partie au musée, le mobilier de la salle à manger est réalisé à partir des dessins du sculpteur Alexandre Callède.
Deux artistes bordelais de renommée internationale ont eux aussi participé à la décoration de cet hôtel particulier : Jean Dupas et René Buthaud. De ce dernier, le musée conserve un grand nombre de vases, de sculptures émaillées et plusieurs panneaux réalisés en fixé sous verre illustrant les différentes périodes du céramiste, du début des années 1920 aux années 1960.
La céramique d’art bordelaise et du sud-ouest est particulièrement bien représentée dans les collections. L’important legs du professeur Robert Coustet permet d’apprécier la richesse et la créativité de cette production autour de la Céramique d’Art de Bordeaux (CAB), fabrique créée en 1919 à Caudéran, la céramiste Marguerite de Saint-Germain active à Talence ou encore Octave et Simone Larrieu à Maubourguet (Tarn).