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Musee des Arts decoratifs et du Design de Bordeaux

musée des Arts décoratifs

et du Design de Bordeaux

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39 rue Bouffard,

33000 Bordeaux

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Boire la tasse

Tasse "Gothique" et sa soucoupe, Manufacture royale de Sèvres, vers 1820-1825, porcelaine à décor bleu et doré (in.2018.5.2.1 et 2)<br/> &copy;  madd-bordeaux - L. Gauthier
Tasse "Gothique" et sa soucoupe, Manufacture royale de Sèvres, vers 1820-1825, porcelaine à décor bleu et doré (in.2018.5.2.1 et 2)
© madd-bordeaux - L. Gauthier

 

Le témoignage d’un usage répandu et populaire de cette expression apparaît pour la première fois dans la cinquième édition du Dictionnaire de l’Académie française publiée en 1798 : « on dit boire à la grande tasse pour se noyer dans la mer1 ». D’après le linguiste et lexicographe Alain Rey2 , l’apparition de cette expression serait directement liée à un drame révolutionnaire qui marqua fortement les esprits : de novembre 1793 à février 1794, le député Jean-Baptiste Carrier, mandaté par la Convention pour briser la révolte vendéenne, fit exécuter, par noyade dans la Loire, entre 1800 et 4800 prisonniers, dont 90 prêtres arrêtés pour avoir refusé de prêter serment à la Constitution civile du clergé. Cet épisode entra dans l’histoire sous le nom de « Noyades de Nantes3 ».

Le substantif « noyade » – qui ne figure pas dans les dictionnaires du XVIIIe siècle mais dérive du verbe « noyer » alors existant – est une création lexicale résultant de cet événement, comme l’indique le dictionnaire de Littré quelques années plus tard : « noyade : action de noyer plusieurs personnes à la fois. Se dit particulièrement des meurtres politiques commis à Nantes par le représentant Carrier en 1794. Les noyades de Nantes ». L’expression « grande tasse » est, quant à elle, un euphémisme puisque le mot « tasse », d’origine perse, est arrivé dans la langue française, au XIVe siècle, via l’arabe et l’italien, sous la forme « tassegrande » 4 . Il désignait à l’origine une grande coupe, voire un vase. Avec la consommation des boissons chaudes au XVIIe et surtout au XVIIIe siècles, il finit par désigner le récipient à anse de moindre dimension que nous connaissons. C’est pourquoi notre époque contemporaine retient – un peu à contresens – que « boire la tasse » consiste à avaler par inadvertance une petite quantité d’eau en nageant, alors qu’à l’origine cela signifiait mourir par noyade. Aujourd’hui, on trouve également le sens encore plus figuré de « subir un échec ».



1 Consultable en ligne : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k50405t/f587.texteImage#

2 Alain Rey, Le Voyage des mots, quatrième édition, Paris, Guy Trédaniel éditeur, 2019, p.250.

3 Georges Lenôtre, Les Noyades de Nantes, Paris, Librairie académique Perrin, 1912, https://archive.org/details/lesnoyadesdenant00lenouoft/page/6/mode/2up

4 Alain Rey, op.cit.